Un éclat de jade.
Elle était l’éclat de jade du temple enfoui
Du monde abrupt et froid aux rives de la cité de la joie
Je traçai des signes sur les murs dans l’usine des anciens temps.
Je raturai le quotidien, marquai d’une entaille chaque étape,
Elle me conta des histoires de chez elle où les murs furent brisés
Par un griot qui marchait sur le fil du rasoir.
Était-elle réelle ou fumée ? Je m’en fiche à présent…
D’un rire à l’autre, d’un éclat à l’autre
Nous nous blottissions au fond de la cité là où les yeux des passants ne pouvaient nous percer.
S’est-on moqué de moi, m’a-t-on menti ?
C’était compréhensible comme je n’ai pas grandi ou vieilli, est-ce que c’est pareil ?
Est-ce que le bonheur, c’est de ne rien dire et de se cacher ?
Les papiers gras envahissent Pacific Palissade,
Ponctuations humaines sur la page immaculée de l’aube urbaine
Et les cotonneuses vagues de l’océan sous l’horizon de verre si ténu et si fragile,
Emportent toutes les lumières de la nuit et les éclats de jade.
Elle contempla mes signes sur les murs que j’étouffai
Et déclara : « Le griot t’aurait bien aimé
Et je sais que tu lui ressembles ».
Il y avait à cette heure de curieuses vibrations, elles cachaient un abîme…
Elles n’avaient cessé de se ramifier sur ce continent,
Il existe des murs que l’on ne peut détruire ou étouffer.
Le cri de la mouette, la fraîcheur du vent…
La cafétéria est encore fermée, il va faire chaud aujourd'hui
La radio sur une fenêtre dit « Un nouveau président est élu »
Nous nous sommes réfugiés près du sémaphore où la lumière est plus douce,
Elle m’a dit, « je suis de passage, mais c’est mieux ainsi,
L’heure présente, prenons là, gardons là tant que l’on peut »
Et les cotonneuses vagues de l’océan sous l’horizon de verre si ténu et si fragile,
Emportent toutes les lumières de la nuit et les éclats de jade.
Et les papiers gras de Pacific Palissade sur les coussins des terrasses
Ponctuent le sable de graffitis dérisoires.
Los Angeles, cité de la joie, aux rives du monde abrupt et froid…
Je vois un vieillard noir qui palabre, « Mon fils, je crois que tu es dans le vrai »
Mais ce n’est que le vent qui appelle le cri des mouettes.
Chaque oiseau apporte une nouvelle d’Afrique
Sur des enfants en chemin et des vieillards indulgents.
Et des murs qui s’effondrent dans des nuages de poussière rouge.
L’aurais-je gardée ? On n’enferme pas le vent, ni les vagues, ni le cri des oiseaux.
Elle avait des éclats de jade dans ses yeux qui lui donnaient toute la sagesse du monde
Le soir, dans les dunes, j’entends sa voix qui raconte.
Je ne suis pas malheureux, je sais qu’elle parcourt le monde
Je vis sur la terre, c’est suffisant comme raison d’être satisfait
Sur les palissades, je rature le quotidien, marque d’une entaille chaque étape.
Et les cotonneuses vagues de l’océan sous l’horizon de verre si ténu et si fragile,
Emportent toutes les lumières de la nuit et les éclats de jade.
Et partout, sur la planète, des murs s’effondrent dans des nuages de poussière rouge
Chaque oiseau apporte une nouvelle d’Afrique
La radio sur une fenêtre dit « Un nouveau président est élu »
« Mon fils, je crois que tu es dans le vrai »
(février 2009)