- Emilie a écrit:
- Flâner dans le jardin
Ne voir aucune fleur
Parcourir les allées
En quête du bonheur
C'est vrai ? eh bien, si tu ne vois pas les fleurs, elles, elles te voit...
En voici la preuve, poète...:
Le poète s'en va dans les champs; il admire
Il adore, il écoute en lui même une lyre;
Et le voyant venir, les fleurs, toutes les fleurs,
Celle qui des rubis font pâlir les couleurs,
Celle qui des paons même éclipseraient les queues
Les petites fleurs d'or, les petites fleurs bleues,
Prennent, pour l'acceuillir agitant leurs bouquets
De petits airs penchés ou de grands airs coquets,
Et, familièrement car cela sied aux belles:
--Tiens, c'est notre amoureux qui passe disent-elles
Et, pleins de jour et d'ombres et de confuses voix,
Les grands arbres profonds qui vivent dans les bois,
Tous ces vieillards, les ifs, les tilleuls, les érables,
Les saules tout ridés, les chênes vénérables,
L'orme au branchage noir, de mousse appesanti,
Comme les ulèmas quand paraît le muphti,
Lui font de grands saluts et courbent jusqu'à terre
Leurs têtes de feuillée et leurs barbes de lierre,
Contemplent de son front la sereine lueur
Et murmurent tout bas, c'est lui, c'est le rêveur !
Victor Hugo (juin 1831)
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