La montagne

LA MONTAGNE

Dominant la vallée où les chemins s’emmêlent,
De lunes esseulées en étés flamboyants,
Auréolée de nues, de neiges éternelles,
Elle est loin des embruns qu’ébouriffe le vent.

Comme un sphinx délaissé et sculpté par les dieux,
Sa muette beauté courtise les nuages,
Dans le silence froid, ses cimes font, aux cieux,
Un étrange ballet : on dirait un mirage.

Les rochers l’enveloppent de sérénité ;
Dans sa Tour de Babel touchant le firmament,
Elle est loin des demains, la tête dans le vent ;
L’instant meurt et revit dans son éternité.

Le regard de l'amour embellit toute chose,
Des vendeuses d'hymen aux laides délaissées,
Porté par tous les vents, il constelle les roses
D'un mystique parfum enivrant et sacré.

Je t'aime d'un amour si joyeux et si tendre
Et mon coeur se soumet au baiser savoureux
Que me donne, en secret, ta bouche palissandre
En baptisantmon front d'un écho merveilleux.

Si tu portes l'amour tout entier dans ton âme,
Un rêve de tendresse et de fécondité
Crépite, doucement, dans la brûlante flamme
De mes yeux envoutés, sous la lune d'été.

Mon amour est si grand que nulle créature
N'en pourrait pénétrer le mystère divin
Le lion y chercherait vainement sa pâture
Et se consumerait d'anémie et de faim.